photo d'une femme scientifique dans la station spatiale

HTM-ELLES Quand l’écriture inclusive devient un levier pour attirer les femmes vers la tech

HTM-ELLES : Quand l'écriture inclusive devient un levier pour attirer les femmes vers la tech

À l’occasion de la Journée internationale des femmes et des filles de science, le 11 février, Concertation Montréal (CMTL) a lancé une campagne ingénieuse pour encourager davantage de femmes à se tourner vers les métiers de la tech. Baptisée HTM-ELLES, cette initiative détourne les URL créées par inadvertance par l’usage de l’écriture inclusive en véritables outils de sensibilisation.

Une idée brillante pour valoriser les femmes dans la tech

L’initiative Techno au féminin+ a décidé d’exploiter un problème technique lié à l’écriture inclusive : les URL accidentelles générées par le point bas (utilisé à la place du point médian, plus complexe à insérer) ne mènent souvent nulle part. Ces liens inutilisés ont été rachetés pour rediriger les internautes vers htm-elles.ca, une plateforme dédiée à la mise en avant des femmes inspirantes dans les secteurs des STIM (sciences, technologies, ingénierie et mathématiques). Une étude de Randstad démontre que moins de 25% des emplois dans ces secteurs sont occupés par des femmes.

Pourquoi cette idée est-elle essentielle ? Parce que les role models jouent un rôle clé dans l’orientation professionnelle des jeunes filles. Pourtant, les femmes de science restent sous-représentées et trop souvent invisibilisées, freinant ainsi les ambitions des futures générations dans ces domaines.

photo d'une femme scientifique dans la station spatiale

L’écriture inclusive face aux défis techniques

Le point médian (·) est une abréviation combinant les formes masculine et féminine d’un mot. Par exemple, directeur·rice se lit directeur et directrice. Bien que son usage gagne en popularité, il reste absent des claviers standards, ce qui pousse de nombreuses personnes à utiliser le point du bas (.), qui est plus rapidement accessible.

Cependant, ce point du bas, utilisé à l’intérieur des mots comme inspirant.es, est interprété par les systèmes comme une URL. Résultat : un lien est automatiquement créé, mais il ne mène nulle part. Cette problématique technique met en lumière deux enjeux majeurs :

  • Une technologie à adapter pour plus d’inclusion
    La technologie doit suivre les évolutions sociétales, qu’il s’agisse d’intégrer le point médian sur les claviers, de réduire les biais dans l’intelligence artificielle ou d’améliorer les pratiques SEO pour une meilleure inclusivité. L’inclusion est toujours un gain collectif, jamais un frein.

  • Transformer un problème technique en opportunité
    La campagne HTM-ELLES montre qu’il est possible de tirer parti d’un obstacle technique pour en faire un levier d’inclusion et de sensibilisation. La technologie, loin d’être une limite, peut devenir un outil puissant pour accompagner les pratiques émergentes.

L’avenir d’une technologie inclusive

Cette campagne originale rappelle que l’écriture inclusive est bien plus qu’une tendance : c’est un outil pour repenser la langue et la société. Elle souligne également l’urgence pour les développeur·euses et concepteur·rices d’adapter leurs outils aux nouveaux usages.

Si des caractères comme le « ù », utilisé dans un seul mot français (), trouvent leur place sur un clavier, pourquoi pas le point médian ? La réponse à cette question réside dans une volonté collective de rendre la technologie plus ouverte et inclusive.

Avec des initiatives comme HTM-ELLES, les obstacles techniques deviennent des opportunités pour valoriser les femmes et les filles dans les domaines scientifiques et technologiques. Une campagne qui, à l’image de son objectif, inspire et montre la voie.

Et vous, comment voyez-vous l’avenir de la tech inclusive ?

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Institut de France

Que penser du 9e dictionnaire de l’Académie française ?

Que penser du 9e dictionnaire de l'Académie française ?

Le quatrième et dernier tome du neuvième dictionnaire de l’Académie française a été achevé ce mercredi 13 novembre 2024, marquant la fin d’un projet commencé il y a près de 40 ans.

La dernière édition remontait à 1935, soit presque un siècle plus tôt, un laps de temps durant lequel la langue française a considérablement évolué. Pourtant, malgré son apparent prestige, cette nouvelle version soulève plusieurs critiques.

Institut de France

1. Un dictionnaire incomplet

Bien que cette neuvième édition couvre 53 000 entrées, elle reste loin des standards actuels. À titre de comparaison, le Grand Robert en ligne en compte 150 000 et le Wiktionnaire 400 000.

Le premier volume, allant de A à Enzyme, est sorti en 1992. Cela signifie que des évolutions importantes survenues dans la langue française depuis, comme l’apparition de nouveaux mots ou de nouvelles définitions, en sont absentes.

Comme l’a repéré la linguiste Laélia Véron sur son compte Instagram (@laelia_ve), certaines définitions sont totalement déconnectées de l’usage courant :

  • L’adjectif « stylé » est défini ainsi : « Se dit d’un employé de maison, d’hôtel, etc. qui accomplit ses tâches en se conformant parfaitement aux règles de sa profession, aux meilleurs usages. Le personnel de cette maison est stylé. Un serveur très stylé. » Le sens le plus courant, que l’on peut trouver par exemple dans Le Robert, « Qui a du style, de l’allure » n’apparait nulle part.
  • Le nom commun « mail » est réduit aux sens suivants : 1. « Petite masse cylindrique de bois, fixée à un long manche » ; 2. « Promenade publique spacieuse et généralement plantée d’arbres » ; 3. « Gros marteau ». Son emploi actuel dans le numérique, le plus courant, n’est pas mentionné.

Le Dictionnaire de l’Académie française, à cause de sa lenteur de publication et de ses choix éloignés des usages contemporains, est donc obsolète dès sa sortie, créant un contraste frappant avec les mises à jour annuelles des dictionnaires comme Le Robert, Hachette ou Larousse.

2. Un dictionnaire conservateur

Les choix lexicaux et les définitions proposées par l’Académie sont loin d’être neutres. Par exemple, l’absence de certains mots usuels comme « féminicide » ou « smartphone » pose question. Leur exclusion semble dénier leur légitimité et invisibiliser des réalités sociales ou des évolutions technologiques majeures.

Certaines définitions font également polémique, comme celle de l’adjectif « hétérosexuel, -elle » : « Relatif à la sexualité naturelle entre personnes de sexe différent ». Ce choix sémantique semble sous-entendre que toute autre sexualité serait « contre nature », une posture réactionnaire et homophobe.

Ces exemples montrent comment les orientations de l’Académie peuvent perpétuer des biais en refusant de refléter l’évolution de la société.

3. Où sont les linguistes ?

Contrairement à ce que l’on pourrait croire, il n’y a pas de linguiste qui siège à l’Académie française. Seule Barbara Cassin est philologue et spécialiste de philosophie grecque.

Dans son discours officiel, Emmanuel Macron confond compétences esthétiques et scientifiques : « Ceux qui définissent la langue ne sont pas forcément des linguistes mais aussi des écrivains. Ils en ont le goût, l’usage. »

On peut très bien manier la langue avec finesse et virtuosité sans rien connaitre à la phonétique historique, à la lexicologie, à la sociolinguistique, etc. La linguistique est la science du langage qui observe le fonctionnement et l’évolution de la langue à travers une approche descriptive sans jugement esthétique.

Ainsi, nous conclurons avec le Collectif des linguistes atterréEs qui a publié une tribune dans Libération : « Le travail actuel de l’Académie à ce dictionnaire n’a plus de sens, tant sur le plan économique que scientifique. Les académiciens n’ont pas les compétences techniques et scientifiques. »

En savoir plus sur les dictionnaires : « Les dictionnaires ont-ils toujours raison ? »

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