Les dictionnaires ont-ils toujours raison ?

Quand on ne connait pas le sens ou l’orthographe d’un mot, on a souvent le réflexe d’aller cherche dans un dictionnaire papier ou numérique. Et pourtant, les dictionnaires n’ont pas toujours existé. Comment faisait-on avant ?

Avant l’arrivée progressive des dictionnaires et des ouvrages de grammaire, la graphie des mots n’était pas stabilisée et changeait d’un texte à l’autre, parfois même plusieurs fois au sein d’un même texte : c’est pourquoi on préfère parler de graphie que d’orthographe (« graphie correcte ») pour les textes rédigés avant la standardisation du français écrit.

En 1680, le grammairien Pierre Richelet publie le premier dictionnaire français. Il choisit une orthographe modernisée assez proche de la prononciation.

En 1694, l’Académie française publie à son tour un dictionnaire mais choisit à l’inverse une orthographe étymologique déjà très éloignée à l’époque de la prononciation du français, reposant sur une logique de proximité avec le latin.

On voit déjà se dessiner deux approches très différentes de l’orthographe : transparente et proche de la prononciation versus étymologique et proche du latin.

Dictionnaire

Aujourd’hui, le nombre de dictionnaires s’est multiplié. La plupart sont édités par des sociétés privées comme Larousse, Hachette, Le Robert… qui font appel à des lexicologues (spécialistes de l’étude du vocabulaire).

Dans le secteur public, l’Office québecois de la langue française et la Délégation générale à la langue française et aux langues de France assurent le travail de veille lexicographique.

Chaque année, il faut choisir quels mots vont entrer et sortir du dictionnaire et il faut trouver des définitions aux nouveaux mots. Cette sélection n’est pas neutre.

Ainsi, chaque dictionnaire adopte un positionnement différent. Certains sont plus conservateurs et choisissent des mots issus de textes littéraires et appartenant à la culture dominante, retardant l’entrée de certains néologismes pourtant déjà inscrits dans la langue courante. D’autres, plus inclusifs, font entrer des mots apparus récemment, appartenant notamment au domaine de l’oralité et à l’ensemble de la francophonie.

Pour aller plus loin

Lire la suite »

Parle-t-on encore aujourd'hui la langue de Molière ?

On entend souvent dire que le français, c’est « la langue de Molière », tout comme l’anglais serait « la langue de Shakespeare ». Pour rappel, Molière est un dramaturge français du XVIIe siècle. Le français de cette époque est appelé le français « classique ». L’orthographe, la prononciation et le sens des mots ont beaucoup évolué en 400 ans. Voici un extrait de l’édition originale de la pièce « Le Misanthrope » en 1666 :

Le Misantrope - Edition originale

Source : gallica.bnf.fr / Bibliothèque Nationale de France

Rien que dans ce court extrait, on peut remarquer que :

  • les lettres I et J et les lettres V et U ne sont pas distinguées : ie > je et auoir > avoir
  • certaines consonnes ne sont pas écrites : misantrope > misanthrope, embrassemens > embrassements, indiférent > indifférent, supliray > supplierai
  • les accents ne sont pas systématiques ou différents des accents actuels : estre > être, declare > déclare, arrest > arrêt, plaist > plaît, apres, aprés > après
  • les terminaisons de l’imparfait et du conditionnel sont écrites (et prononcées) différemment : auois > avais, irois > irais
  • l’ordre des mots est différent : ie m’irois […] pendre > j’irais me pendre
  • certains mots ont changé de sens : caresses signifie flatteries

Lorsqu’on va au théâtre aujourd’hui, la prononciation est le plus souvent modernisée, sinon on ne comprendrait pas grand chose. On parle de français restitué lorsque les pièces sont jouées avec une prononciation plus fidèle à celle de l’époque où elles ont été écrites, mais c’est assez rare en dehors du cadre universitaire.

A bien des égards, la langue parlée à l’époque de Molière est donc très différente de la nôtre !

Pour aller plus loin

Lire la suite »

Retour en haut